30 octobre 2008 : nous récupérons enfin le camion et la caravane en fin de journée et quittons immédiatement Buenos Aires où nous sommes restés 10 jours.
Tout est en bon état, rien n’a été volé ou abîmé malgré nos 6 mois d’absence, le storage en Australie et les 9 semaines de transit en container à travers la moitié des mers du globe.
Par contre, il y a beaucoup de rangement et de nettoyage à faire.
Nous roulons 300 km vers le nord le long du rio Parana et arrivons dans la petite ville de Rosario recommandée dans notre guide de voyage.
Nous testons pour la première fois un camping argentin. C’est un grand parc arboré avec de la pelouse et plein de jeux pour enfants. Nous découvrons le traditionnel « asado » du week-end, très populaire chez les Argentins qui se retrouvent tous autours d’un grand barbecue et font la fête tard le soir. Très tard même, la musique bat son plein jusqu’à 4 h du matin. Les Argentins comme les Espagnols sont des fêtards qui parlent fort et se soucient peu de leur entourage. Nous sommes loin du civisme anglo-saxon auquel nous nous étions habitués en Australie !
Nous sommes le seul camping-car parmi les tentes et il n’est pas très facile d’engager la conversation. Il faut dire que notre espagnol est beaucoup plus limité que notre anglais et qu’il nous faut un peu de temps pour se remettre dans le bain. Les filles quant à elles sympathisent immédiatement et se font tout un groupe de copains. Leur espagnol progressera sûrement plus vite que le nôtre.
À la fin du week-end, le parc est transformé en une énorme décharge publique jonchée de papiers gras et de sacs plastiques et les sanitaires, déjà peu ragoûtants, sont maintenant infréquentables.
Nous testons les fameuses « parillas » les restaurants de viande grillée.
D’immenses barbecues sont installés sur le trottoir, devant les restaurant s et la cendre est préparée dès le matin. Des bêtes entières sont ainsi grillées et la réputation de meilleure viande du monde n’est pas volée. Par contre, il faut se battre pour avoir un steak saignant, les Argentins ayant la fâcheuse habitude de croire que bien cuire la viande tue les microbes. Si la viande de qualité est partout présente par contre les légumes se font rares. Ils sont souvent ou à moitié desséchés ou à moitié pourris et coûtent une fortune. Ainsi, il n’est pas rare de payer un steak de 500 grammes le même prix qu’une salade composée !
Bien sûr, nous avons goûté les fameux « alfajores » gâteaux traditionnels argentins à la « dulce de leche » et désolé, on n’aime pas. La « dulce de leche » est une sorte de lait concentré sucré qui agrémente tous les desserts et est affreusement écoeurante. Ils en mettent partout, dans les gâteaux, dans les flans, dans les glaces…
En général, en Amérique du sud, tout est très sucré. Il faut se battre pour trouver un paquet de café moulu sans sucre ajouté ou un yaourt vraiment nature. Même les croissants ont droit à une petite couche de sucre fondu sur le dessus, ce qui les dénature à mon goût.
La ville est plutôt agréable, les rues et les avenues, toutes traditionnellement à angles droits, sont plantées d’immenses catalpas en pleine floraison violette qui donne un petit air gai au lieu. Les musées sont sans prétention et la réputation de « ville que l’on ne voudrait jamais quitter » selon notre guide «Lonely Planet» est un peu exagérée.
Encore quelques centaines de kilomètres vers le sud cette fois et nous arrivons à San Antonio de Arreco qui célèbre une fois par an la grande fête nationale des « gauchos », les cow-boys argentins.
Quelle chance ! Par pur hasard, nous arrivons dans la ville pour cette fameuse fête annuelle qui rassemble des centaines de gauchos et des milliers de chevaux pour des spectacles, des rodéos et des concours de lasso. Le camping, au bord de la rivière, est nettement plus agréable et propre que le précédent. Nous sommes au milieu de la verdure avec en face sur l’autre rive le spectacle de dizaines de chevaux qui viennent s’abreuver à la rivière. L’ambiance est magique.
Tout le week-end, nous assistons aux défilés de chevaux et de leurs cavaliers en habits traditionnels, aux démonstrations de danses paysannes et du fameux rodéo. La fête attire des touristes mais aussi beaucoup d’Argentins qui nous expliquent avec passion leurs traditions culturelles. Un exercice spécialement intéressant consiste à essayer de mélanger plusieurs hordes de chevaux entre elles provenant de différentes haciendas en les faisant galoper dans un enclos en tous sens. Chaque horde est menée par un cheval portant une grosse cloche à son cou qui sonne le rassemblement.
Normalement , les chevaux suivent leur leader et ne se mélangent pas. Les chevaux disparaissent dans une atmosphère saturée de poussière, sous un soleil de plomb. On est complètement immergé dans l’ambiance inoubliable de la pampa !
Nous devons maintenons traverser toute la pampa sur quelques 1600 km, ce qui nous prendra plusieurs jours de route très lassante.
L’Argentine est un pays 5 fois plus grand que la France et la pampa est un immense territoire qui s’étend sur des milliers de km carrés depuis Buenos Aires jusqu’à la Patagonie. Nous mettrons des jours à traverser ce paysage monotone et plat comme la main qui ressemble en moins beau au bush australien. Pour épargner trop de lassitude aux enfants, nous ne roulons que quelques heures par jour et cette traversée nous paraît interminable.
Quel ennui ! Moi qui imaginais la pampa avec de hautes herbes verdoyantes balayées par les vents, abritant des troupeaux épars de vaches gardées par de beaux « caballeros » à béret noir, je suis déçue. L’herbe est rase, les couleurs sont affreusement ternes et notre route est perpétuellement bordée de barrières de bois et de fils barbelés. L’élevage des vaches est effectivement très extensif et de temps en temps un champ de blé ou de maïs vient rompre la monotonie des couleurs. Nous engrangeons les lignes droites de 100 km en baillant.
Enfin, nous arrivons à la péninsule Valdès, classée Patrimoine Mondial de l’Humanité, où nous attendent plein de surprises.
Ah, on l’aura bien mérité cette fameuse péninsule qui marque plus ou moins la fin de la pampa et l’entrée en Patagonie ! Tout doucement, le paysage a changé et pas spécialement en mieux le long de la RN3 que nous suivons depuis Buenos Aires. L’herbe rase et terne de la pampa a laissé place à un paysage tout aussi plat mais beaucoup plus sec, de buissons rachitiques et poussiéreux, balayés par encore plus de vent. Nous sommes en Patagonie. Nous ne pouvons pas nous empêcher de penser aux premiers colons qui sont arrivés sur cette terre ingrate et le courage et la peine qu’il leur a fallu pour pouvoir s’installer ici.
Cependant, ce paysage désolé et rude ne manque pas de charme.
La péninsule Valdès est réputée pour accueillir et protéger une faune incroyable d’animaux de mers, des baleines, des éléphants de mer, des pingouins, des orques… mais aussi sur la terre ferme des tatous, des nandins et des renards.
Dès notre arrivée, nous faisons une excursion en zodiac pour aller voir les fameuses baleines franches, principale attraction de la péninsule. Nous avons déjà eu un premier contact avec les baleines il y a quelques mois en Nouvelle-Zélande. Ici, les baleines franches sont un peu plus petites (tout de même entre 10 et 14m de long) mais nous avons la chance de pouvoir les approcher de plus près. En fait, ce sont elles qui nous approchent de très près si elles le veulent. Une maman avec ses deux petits vient à moins de 2m du zodiac ce qui m’impressionne beaucoup. Je ne suis pas rassurée même si elles sont inoffensives. Nous pouvons observer les moindres détails des callosités sur leur corps qui sont en fait des micro-organismes nettoyant leurs plaies.
Il y a des centaines de baleines dans la baie à cette époque de l’année, principalement des mamans avec leurs baleineaux sur le point de migrer vers le sud. L’expérience, très émouvante, est inoubliable.
Les éléphants de mer sont aussi très impressionnants même si nous les voyons que de loin malheureusement. C’est la première fois que nous en voyons. Ils diffèrent des lions de mer car ils sont plus gros et surtout les vieux mâles ont une espèce de protubérance assez hideuse à la place du nez qui les font vaguement ressembler à des éléphants.
Les orques ont malheureusement déjà quitté la péninsule à cette époque, nous n’en verrons donc pas. Par contre, le petit eco-centro de Puerto Madryn est très bien fait et les enfants peuvent y voir des vidéos sur les attaques de ces baleines tueuses qui n’hésitent pas à se jeter sur la plage pour gober tout crus des dizaines de bébés phoques affolés. Finalement, mieux vaut ne pas assister au spectacle en direct sous nos yeux avec les enfants….
Les guanacos sont des espèces de lamas très gracieux au pelage roux et blanc. On en voit partout dans la steppe de buissons ras. Ils sont assez peureux.
Nous voyons aussi beaucoup de lions de mer et de pingouins plus communs et en grosses colonies.
Le petit camping miteux de Puerto Pyramides est terriblement décevant . C’est étonnant, vue l’immense fréquentation de la péninsule par des milliers de touristes tout au long de l’année que les infrastructures pour les campeurs ne soient pas un peu plus développées.
Nous décidons de partir faire du camping sauvage, et néanmoins autorisé, sur la plage de Pardelas, plateau rocheux en plein vent d’où nous avons une vue imprenable sur la mer et les baleines.
C’est là que nous faisons la connaissance de 3 familles françaises avec enfants voyageant toutes en camping-car pour plusieurs mois ou plusieurs années sur le continent Américain.
C’est incroyable ! Cela fait bientôt 2 ans et demi que nous voyageons à travers plus de 25 pays différents et c’est la première fois que nous rencontrons autant de familles voyageant avec enfants. Tout le monde s’entend immédiatement très bien, que ce soit les 10 enfants de 3 à 13 ans ou bien les parents. Comme nous allons tous dans la même direction, à savoir Ushuaia et la Terre de Feu pour Noël, nous décidons de faire route ensemble un petit moment.
Les familles Mériguet (www.meriguet-tour.com) et Parcé (www.globegulli.fr) viennent jusque de commencer leurs voyages depuis quelques semaines alors que la famille Pouzet (www.poraquiporalla.com) est partie depuis bientôt 2 ans et a traversé tout le continent américain depuis les USA et l’Alaska. Nous avons plein d’informations à échanger.
Certains sont architecte, illustrateur, d’autres ancien basketteur professionnel reconverti en photographe et il y a même un notaire !
Les bivouacs, bien arrosés, prennent des allures de camp de gitans.
Et parfois même, Colette et Charles, des retraités qui voyagent eux aussi en camping-car, viennent se greffer à la joyeuse bande. Colette, d’une patience exemplaire, sert de grand-mère de substitution à Eve. Elle la maquille et lui peinturlure les ongles à sa plus grande joie.
Les enfants sont ravis d’être ensemble, tous font le CNED et suivent donc le même rythme.
Les papas bricolent car la principale lutte est celle contre la poussière qui s’infiltre partout quand nous prenons les routes de terre (le « ripio).
Je rentre dans mon 6ème mois de grossesse et tout se passe bien même si les chemins de terre en tôle ondulée me fatiguent vite. Une échographie de contrôle dans un hôpital privé de Bahia Blanca me confirme que tout se déroule normalement et un médecin me conseille une excellente clinique à Santiago du Chili où je devrais accoucher mi-mars.
Les filles commencent à compter les jours et l’impatience grandit.
Isa
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